vendredi 15 décembre 2006

Tournée Australie 2006 (extraits du carnet de bord)

21 novembre 

départ de l’aéroport charles de Gaulle, terminal 1 .
13 h d’avion jusqu’à Kuala Lumpur...difficile de s’en remettre...

22 novembre 2006, 7h du matin

arrivée à Kuala Lumpur
pas d’air et une humidité maximum
des palmiers partout et une agitation permanente.
Il nous faut 1 heure pour sortir de l’aéroport ultramoderne de KL. Un bus nous conduit à l’hotel car nous avons 15 heures d’escale. L’hotel est à 60 km de l’aeroport...pas très interessant car situé au milieu de nulle part.
Nous nous reposons un peu et nous sommes reveillés par la prière de l’après midi – il y a une grande mosquée bleue près de l’hotel et le muezzin n’en finit plus d’appeler les fidèles à la prière...Cela envahit tout l’hotel...
Notre séjour éclair en Malaisie nous laisse une impression en demi teinte : les constructions de cités dortoirs qui sortent de terre le long de la route sont assez effrayantes et l’Islam nous est apparu très intrusif.
Notre avion pour Adelaide part à 21h45.

23 novembre 7h15

Arrivée à Adelaide après une seconde nuit passée dans l’avion.
Nous retrouvons nos hôtes quelques heures plus tard à l’Alliance française.
La ville d’Adelaide est très étendue. Tout le monde a une maison individuelle et un jardin. C’est très vert et fleuri. Il faut dire que nous sommes au début de l’été là bas. Nous logeons dans une grande maison à la lisière du parc naturel de Cleland.
C’est une grande maison en bois, de style colonial avec beaucoup de fleurs et d’arbres, et une piscine... Il y a même un koala qui vit sur les hauteurs de la maison, mais nous ne le verrons pas.
Amateurs de vin et de cuisine française, nos hôtes, John et Helen, nous gâtent beaucoup et nous buvons de très bons crus australiens. Ils nous emmenent faire des courses dans un marché couvert au coeur de la ville où tout parait vraiment appétissant...
l’Australie peut produire tous les fruits et les légumes qu’elle veut grâce à son climat.
L’après midi je fais l’erreur de faire la sieste...le réveil sera difficile...
Nous nous couchons à 7 h du soir pour nous reveiller à 7 h le lendemain !

24 Novembre

Répétition et déjeuner au bord de la piscine...C’est magique de pouvoir travailler dans un jardin !
Nous partons ensuite voir les chutes d’eau qui marquent l’entrée du parc naturel de Cleland.
A cause de la sécheresse qui règne en ce moment sur le sud de l’Australie, les chutes d’eau sont moins spectaculaires. On nous raconte que la sécheresse est très grave dans le pays et que de nombreux feux de forets sevissent partout depuis quelques jours.
Nous avons la chance de découvrir un koala endormi sur une branche basse...C’est un animal vraiment étrange ; rien de semblable en Europe. Il gagne évidemment le droit d’être photographié sous toutes les coutures.
La soirée se passe tranquillement et nous nous couchons tôt. 





25 novembre

1er jour du festival français d'Adelaïde
Il fait une chaleur assomante.
33° sur scène...ce sera l’enfer et la harpe Aziliz gracieusement prêtée par Camac est difficile à sonoriser.
Nous aurons un bon accueil du public malgré tout.
Le festival se déroule dans le parc de Carrick Hill, qui entoure un manoir du XIXeme siècle.

Les gens qui nous entourent ont pour l’instant l’air d’appartenir à des milieux aisés. Je me demande où vivent ceux qui n’ont pas les grandes villas cossues quui nous entourent...
Je m’étonne aussi de n’avoir pas croisé, où même que l’on n’ai pas évoqué devant nous, le peuple aborigène et leurs descendants, qui sont les natifs de l’Australie. Une forte impression de tabou pèse sur leur existence et l’apport patrimonial qu’ils représentent....
La colonisation de l’Australie est récente : la famille de Helen, notre hôte, fait partie des pionniers du pays et ils sont arrivés seulement en 1842...C’est dire si la présence des blancs ici est récente...
Comment vivre ce sentiment au quotidien ?

26 novembre

2ème jour du festival
Nous jouons tôt, à l’ouverture (vers 11h30). Notre show sera meilleur que la veille car nous sommes plus reposés et les ingénieurs du son ont enfin trouvé comment sonoriser au mieux la harpe.

A 14h je donne un workshop dans une église de la campagne d’Adelaide. Il est organisé par la Harp Society locale. 2h de travail avec les étudiants. Je leur ai joué plusieurs thèmes et ils ont choisi une de mes compositions pour plusieurs harpes : « d’un soir »...
Peut être l’enregistrerai-je un jour.

27 novembre

location d’une voiture et départ pour deux journées d’excursion au sud.
Les australiens roulent à gauche et les limitations de vitesse sont excessivement basses.
Nous traversons des paysages déserts d’herbes jaunes et d’eucalyptus (Gumtree).
Un détour par Willunga nous fait prendre une petite route escarpée qui serpente dans les collines.

Arrivée à Victor Harbour pour un déjeuner au bord de la mer.
C’est une ville qui a l’air très touristique mais nous y arrivons complètement hors saison et tout est désert.
Nous nous promenons sur Granite Island, une minuscule île au large de la ville.
Bien qu’aménagée entierement pour accueillir les touristes, avec tout le kitsch que cela peut comporter (balade en calèche, magasins et restaurants...), cette ville a un vrai charme.

Nous nous baignons dans une mer turquoise. Il n’y a pas de vagues et il faut marcher longtemps vers le large pour avoir de l’eau jusqu’aux cuisses.

Nous repartons et dépassons Port Elliott pour arriver à Goolwa.
C’est une ville touristique avec un port de plaisance ancien et une marina moderne.
Tout est désert et cela en devient presque angoissant.
Nous observons des oiseaux extraordinnaires : perroquets blancs ou rouges, hérons et même un gigantesque pélican qui se laisse photographier sur la jetée.
Difficile au milieu de cette cité déserte de trouver à se loger et à se nourrir...
Après une quête infructueuse nous élisons domicile pour la nuit dans un motel et dînerons dans un fast food...on ne pourrait pas faire moins romantique...
Les seuls habitants que nous croisons semblent sortis d’un road-movie un peu effrayant... 





28 novembre

départ de Goolwa pour revenir lentement à Adelaide en longeant la côte.
Ce qui etait frappant dans cette ville, à part la quantité incroyable d’oiseaux que nous avons pu y observer, c’est l’absence de population dans les rues...où sont les habitants ? N’y a-t-il que des résidences secondaires ? départ de Goolwa pour revenir lentement à Adelaide en longeant la côte.
Imaginez une très jolie petite cité avec une marina, une mer turquoise, de grandes villas, des aménagements modernes au sein d’une nature sauvage et qui serait déserte...une ville fantôme !

Nous revenons à Port Elliott où nous ne nous étions pas arrêtés la veille pour découvrir des paysages grandioses..falaises blanches et mer bleu electrique. De grands oiseaux noirs qui doivent avoir leur nid le long de la falaise nous chassent de leur territoire...
Port Elliott est une tentative avortée de port sur cette côte au XIXème siècle : après quelque années de mise en service, le port a en effet été complètement abandonné au profit de Victor Harbour car l’endroit était trop dangereux : plus de 8 bateaux s’y étaient échoués la même année.
En apprenant cela nous pensons aux pionniers qui se sont établis dans cet immense pays...la colonisation est finalement très récente et nous imaginons l’aventure que cela a pu représenter pour les anglais , les irlandais, les allemands ou les hollandais qui ont tenté le voyage : la traversée devait durer des mois et sur place les arrivants étaient confrontés à une nature sauvage – tout était à construire.
C'est encore très présent dans le paysage d’aujourd’hui : partout des constructions, des villas modernes, des routes qui sortent de terre, des cultures...C’est un pays immense où tout est toujours pensé « en grand ».
Ici chacun possède sa maison et son jardin et impossible d’imaginer la vie quotidienne sans voiture...a côté de cela, la France ressemble à une maison de poupée avec des villes et des paysages miniatures.

Je ne peux pas m’empêcher aussi de penser aux habitants qui étaient là avant les colons, les aborigènes.
Nous apprenons avec effroi que dans certaines régions, comme la Tasmanie, dans laquelle nous allons nous rendre quelques jours plus tard, ils ont été tout simplement exterminés par les nouveaux arrivants blancs.
Il semble que la mauvaise conscience du pays commence à peine à se réveiller à ce sujet.

Nous coupons par les terres pour nous rendre sur la côte ouest à Normanville où nous déjeunerons.
Notre route déroule sans fin ses paysages de Gumtrees. Le sol est très sec. Les quelques maisons que nous dépassons sont des fermes isolées.
A quoi ressemble une enfance ou une vie entière dans l’une d’entre elle ?

Déjeuner dans un restaurant au bord de la palge de Normanville.
Les mouettes se disputent les restes des clients sur fond de mer turquoise et de ciel bleu. Aucun nuage.
Le soleil est vraiment mauvais car il reste vertical une bonne partie de la journée. Heureusement nous pouvons nous mettre à l’ombre sur la plage, sous un ponton de bois qui se jette dans la mer
Nous nous baignons trois fois. Il y a des dauphins qui jouent au large. Ils sont trop loin pour essayer de nager avec eux...

Retour à Adelaide en fin d’après midi.

29 novembre

une chaleur éprouvante dès le matin.
Nous partons pour Cleland, un grand parc naturel sur les hauteurs d’Adelaide.
Nous y verrons des kangourous et les extraordinnaires koalas. Nous nous plions au rituel des photos en leur compagnie . Ce sont de gros mangeurs d’eucalyptus et cela les fait dormir une bonne partie de la journée, comme un somnifère... !

Une longue route en voiture nous conduit ensuite à Mc Larren Valley où John tient à nous faire visiter l’exploitation d’un ami vigneron.
En résumé, bien que les cépages soient d’origine française, les vins australiens sont très différents de ceux qu’on peut trouver en France : + de tanins, + de sucres, + d’alcool. On nous explique que cela correspond au goût local et que le climat chaud et sec fournit des grappes très (trop ?) sucrées...Leurs bouteilles ne se conservent pas très longtemps.

Retour à Adelaide après cette expérience du vin australien. Un peu de fraîcheur au bord de la piscine nous remet d’aplomb. Nous dînons en ville dans un restaurant chinois et la soirée se terminera par une promenade nocturne dans les rues de d’Adelaide en sirotant des glaces...

30 novembre

Départ pour la Tasmanie
C’est à environ 1h30 d’avion et il y a une demi heure de décalage horaire supplémentaire.
La Tasmanie est la terre la plus au sud (avec la Nouvelle Zélande) avant le pôle.
C’est d’Hobart, la capitale, que partent toutes les expéditions polaires (nous verrons l’Astrolabe amarré dans le port). La température est beaucoup plus fraîche ici...l’idéal..une météo qui me fait penser à la Bretagne.
Quant à l’architecture elle est beaucoup plus a taille humaine que sur le Mainland. Hobart ressemble au croisement entre une petite ville bretonne, avec des cottages et des jardins anglais, un port hollandais et des rues « en montagnes russes » qui rappellent San Francisco.

Nous visitons brievement la ville et nous sommes invités pour la soirée chez des membres de la harp society locale qui réunissent chez eux quelques amis. On nous fait découvrir des tas d’instruments de musique : une étrange « guitare-harpe », des luths renaissance (ils ressemblent tout à fait à des ouds), un dulcimer...
Nous logeons chez Jenny, botaniste et harpiste amateur.
Le chat nous a adopté. 





1er décembre

Depuis que nous voyageons à l’intérieur du pays, je m'interroge sur la colonisation. C’est un pays très jeune, colonisé il y a à peine 200 ans.
Comment vivre cette histoire ?
Quelle peut être la relation à l’autre et surtout y a-t-il une culpabilité vis à vis de ceux que l’on a spolié, chassés ou tués...les gens qui s’installent aujourd’hui en Australie ne doivent assurément pas s’encombrer d’une responsabilité qui n’est pas la leur, mais, en même temps, comment ne pas y penser ? Comment ne pas ressentir le poids de la violence faite aux natifs de cette terre ? Une autre question est celle des monuments.
Ici une église dsu XIXème siècle, là, un bâtiment des années 30...ils sont considérés avec la valeur et le charme de l’ancien.
Avec notre regard d’européens, difficile de porter le même regard patrimonial sur ce qui nous entoure tant flotte un parfum de nouveauté sur l’architecture.
Pour moi la vraie puissance du temps passé dans ce pays réside dans la force millénaire des paysages que nous croisons au fil de l’aventure.
Le souvenir des peuples aborigènes y est à peine caché et se respire dans ces paysages très forts.
On dit d’ailleurs que le langage des peintures aborigène (qu’on présente aujourd’hui comme de l’art contemporain dans les galeries !) est celui de leur paysages ancestraux.
Ces peintures sont les cartes magiques de leurs terres, des clés pour s’y repérer...

Nous montons au mont Wellington – 1270 m d’altitude au dessus de Hobart.
D’une végétation luxuriante, nous voyons progressivement apparaitre des paysages désolés de rochers et d’arbres morts qui ploient sous le vent.
Au sommet, seuls subsistent quelques buissons épars. C’est un paysage lunaire, très gothique. La température frôle à peine les 8°. Le vent souffle fort. Le seul habitant que nous croiserons sur le plateau est un lézard brun qui tente de se réchauffer entre deux rochers...

Concert le soir dans un club de Jazz de Salamanca (la partie ouest du port d’Hobart)
Le concert se déroule à merveille.

Tous les concerts et workshops ici en Tasmanie sont organisés par la harp society locale et la harpiste Christina Sonnemann qui est une guide enthousiaste de son pays et nous accueille comme des rois. 





2 décembre

Balade à pied dans Hobart...petites ruelles et maisons colorées qui doivent réchauffer les couleurs de l’hiver local.
Départ pour le centre de la Tasmanie.
Sur notre route nous croiserons des cygnes noirs, beaucoup de moutons, des vaches, des taureaux noirs, des oiseaux étranges, un faucon...

Un workshop est organisé à Oatland, une minuscule ville au milieu de nulle part .
Quel endroit bizarre pour réunir tous ces gens !
L’atelier de harpe a lieu dans une église.
Les paysages autour de nous sont désertiques (arbres morts, maisons abandonnées....)
il y a des averses glacées et le vent fait trembler les murs de l’église au point de couvrir le son des harpes !
On ne peut pas croire que nous sommes en été.
Les élèves apprennent eux aussi une de mes compositions.

Nous dînons à Ross (ville très touristique avec trois églises et un célèbre pont construit par les bagnards).
La boulangerie cuit aussi des pizzas délicieuses et la boulangère, d’origine écossaise, est très fière de nous montrer l’immense four à pain dans lequel ils peuvent cuire jusqu’à 300 pains à la fois.

Nous logerons ce soir à une vingtaine de km de Ross 





Le village s’appelle Tunbridge et compte à peine 80 âmes.
Là encore nous avons la sensation de faire escale dans une ville fantôme ;
Nous sommes logés dans un magnifique petit cottage, rénové et aménagé avec beaucoup de goût.
Il y a deux grandes cheminées qui sont les bienvenues le soir tombé.
Nous passons un moment merveilleux dans cet endroit mais il faut deja repartir... 





3 décembre

Départ pour une route d’environ 200km vers le nord en direction de Burnie ou nous donnerons un concert dans une galerie l’après midi.
Ici c’est la campagne et on nous raconte que les attractions sont rares...du coup les gens sont enthousiastes et sont venus nombreux pour nous écouter.

Nous logeons à la campagne chez des membres de la Harp Society, Ann et John.
Grande maison et jardin.
Ils ont deux gros chats angoras qu’ils gardent enfermés car ce sont des prédateurs redoutables et les oiseaux ici sont protégés.

4 décembre

Ballade sur la côte avoisinant Burnie.
Plages magnifiques. Mer turquoise et sable fin – personne.
Difficile de se baigner malgré le cadre paradisiaque car l’eau est à 12° ! 





Workshop.
Beaucoup d’étudiants.
Nous travaillons un thème d’hanter dro traditionnel.
Un couple de bretons passait par là par hasard.
Ils sont heureux de faire découvrir les pas de la danse aux élèves.

5 décembre

nous redescendons jusqu’à Hobart et prolongeons encore de 100 km au sud pour aller jusqu’à Port Arthur.
C’est un paysage entre terre et mer, constitué de presqu’îles, de marais, de plages...
Nous passons par Eagle hawk neck, une route relie deux îlots entre eux ; C’était jadis le seul point d’accès à une grande prison.
Le seul point d’évasion possible pour les bagnards passait par là...la route était gardée par des soldats et par des chiens féroces. Les gens du coin adorent raconter cette histoire en souriant...ce n’est pas si loin de nous.

Nous dormons dans un hotel à Port Arthur et dînons au « Fox and Hounds », la meilleure table, parait-il, de la région....
le repas est bon, mais comme souvent lors de notre séjour australien, j’ai l’impression que les chefs cuisiniers confondent qualité et quantité...on nous sert systématiquement de portions gargantuesques !

6 décembre

Retour à Hobart où nous retrouvons Jenny dans la soirée pour notre derniere nuit en Tasmanie...
nous partons demain à 7h et il faudra prendre 4 avions pour rejoindre Paris....